jeudi 23 août 2007

La Droite se saisie de l'Universitée

Auteur : Tanguy Dufournet <dufournet.tanguy@orange.fr>

Sarkozy dit qu’il est dans la rupture, qu’il n’est pas de cette vieille droite qui a trahi, qui a trompé, qui avance sournoisement quand les gens ne sont pas là pour se défendre, pour combattre de mauvaise mesure ou pour donner leur avis... La mauvaise foi de certain sera de dire « mais non, il fait un truc bien! », alors qu’en réalité, sa première mesure de réforme des universités, pour fonder la nouvelle université, est une mauvaise réforme, une réforme tendant vers l’inégalité.

N’oublions pas que le fondement idéologique de la droite (issus d’une scission au sein de la Nouvelle droite) est l’anti égalitarisme... le même fondement dogmatique que celui de l’extrême droite... Nous pouvons parler aujourd’hui de « peste bleue ».

Parlons plus précisément de la réforme des universités qui s’est faite par la loi sur l’autonomie des universités - votée en douce - dite la loi Pécresse. Je suis allé chercher mes infos sur les sites d’Etats, sur le site d’UNI, le syndicat étudiant de droite et plus, et donc des sites favorables à ce projet de privatisation.

Je vais vous montrer comment ces partisans se contredisent et masque la vérité avec leur méthode de sophiste. Il est nécessaire de ne pas se placer dans une simple opposition, il faut impérativement écouter, comprendre la logique des arguments adverses pour simplement montrer leur contradiction interne. Agissons donc avec philosophie comme le ferait Kant. Celui-ci à juste titre nous dit « la vérité formelle consiste simplement dans l’accord de la connaissance avec elle-même en faisant complètement abstraction de tous les objets et de toute différence entre eux. » et parce que « ces critères formels universels ne sont assurément pas suffisants pour la vérité objective […] ils doivent cependant être considérés comme sa conditio sine qua non. » Autrement dit, si du seul point de vue logique, théorique, il y a contradiction c’est l’ensemble de la vérité qui est fausse et cela même dans sa pratique.

1- Rendre les universités autonomes revient à les privatiser

A cela l’UNI dit FAUX:

Si les universités privées sont bien plus autonomes que les universités publiques, voire le sont intégralement, cela ne veut pas dire que des universités autonomes sont forcément privées. Car c’est l’Etat qui fixe les principales règles, notamment de financement. Même aux Etats-Unis, où il existe de nombreuses universités privées, la majorité des universités restent publiques, malgré une forte autonomie dans leur fonctionnement.

En somme, si une droite A est parallèle à la droite B et que la droite B est parallèle à la droite C alors la droite C est parallèle à la droite A mais la réciproque n’est pas vrai. Ce qui est logiquement incorrect. Je recommence. Si une université est privée alors elle est autonome, mais si une université est autonome, elle n’est pas privée. A cela ils nous disent que c’est l’Etat qui fixe les règles de financement… Or cette autonomie supprime l’influence de l’Etat (entre autre) dans ce domaine. Ce qui veut dire qu’il y aura une probable augmentation des frais d’inscription puisqu’il y a désinvestissement de l’Etat mais ça veut dire aussi des universités à plusieurs vitesses... On y vient avec l’autre exemple de l’UNI : celui des Etats-Unis. Il est clair que les Etats-Unis sont connus pour l’égalité de leur système éducatif, sans ghetto, et par le fait que les parents n’économisent pas dès la naissance des enfants pour leur payer leurs études dont le prix s’élève à bien plus que celui de nos Ecoles privées (et pas université).

Par conséquent, si rendre autonome les universités ce n’est pas les privatiser, c’est y tendre et la prochaine étape sera justement la privatisation. De plus nous venons de voir que cet argument, et non seulement, logiquement douteux, si ce n’est faux, mais qu’il est également de facto faux.


2- L’autonomie des universités existe déjà en France

A cela l’UNI dit VRAI et FAUX:

Si l’autonomie des universités est inscrite dans les textes (loi Faure de 1968, qui a consacré leur autonomie administrative, pédagogique et financière ; loi Savary, qui a refondu les grands principes d’organisation), celle-ci reste bien plus limitée que la plupart des pays de l’OCDE.

La loi Faure et le décret Savary ont sonné le glas de la déchéance institutionnelle des Universités en France qui sont des mesures prises par des hommes politiques de Droite et de gauche droitière - de gauche conservatrice ou comme l’appelle Marx « petite bourgeoise ». Preuve est faite - s’il en fallait une - que le chef de la peste bleu est réellement dans la rupture avec les politiques précédentes.

L’expérience nous donne une connaissance certaine des conséquence d’une telle réforme : L’analyse précise des chiffres (sur une seule discipline, la psychologie, prise comme banc d’essai), montre que le décret de 1984 a pour conséquence la réduction de 20 % environ du pouvoir d’achat en fin de carrière pour 65 % des professeurs (10 % de l’effectif global), un effet d’apparence « minoritaire » dont les répercussions sur l’ensemble de l’institution universitaire ont été en réalité considérables.

(Source : http://www.cairn.info/resume.php?ID_REVUE=CNX&ID_NUMPUBLIE=CNX_078&ID_ARTICLE=CNX_078_0047 )

En somme la réforme de ce gouvernement consiste à aller plus loin - et dans la même direction - dans la logique des lois Savary et Faure.

Ensuite l’OCDE est l’Organisation de coopération et de développement économiques... lier les universités à une logique économique et donc de rentabilité n’est-ce pas la faire rentrer dans une logique, non plus éducative mais, d’entreprise privée ? La réponse est évidente car après tout nous savons bien qu’aucune entreprise ne laisse fonctionner une filiale qui n’est pas rentable. Ainsi certaine filière pourrait tout simplement disparaître.

3- La loi sur l’autonomie induira forcément une hausse des droits d’inscription

A cela l’UNI dit FAUX:

Aujourd’hui, c’est l’Etat qui fixe le montant des droits d’inscription, qui reste très faible comparé aux autres pays développés. Si l’autonomie des universités sera accrue suite à la loi, ce ne sera pas le cas concernant les droits d’inscription. Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, a déclaré sa volonté que la fixation des droits d’inscription restent de la responsabilité de l’Etat et ne soient pas augmentés.

En effet, vous l’aurez compris tout réside dans le « Aujourd’hui » c’est-à-dire « aujourd’hui quand la loi n’est pas encore votée » (à l’époque de l’article de l’UNI la loi n’était pas votée- le 5 juin). De plus il se contredit avec la question d’augmentation des frais d’inscription et le premier point où il prend l’exemple des Etats-Unis où les frais d’inscription sont exorbitants. Notons aussi que l’autonomie à son prix. Autrement dit, si certaines universités ne peuvent pas supporter économiquement leur autonomie alors nous aurons un système à plusieurs vitesses. Pour supporter cette autonomie, elle aura besoin d’un soutient économique, or l’Etat qui se désinvestit de cette responsabilité, ne soutiendra pas les universités. De fait, il y aura augmentation des frais d’inscription ou suppression pure et simple de poste et de filière. Or Valérie Pécresse s’est engagée à ce que les frais d’inscription n’augmentent pas, restons alors vigilant dans le cas où nous sommes optimistes, ou sinon n’oublions la célèbre citation de Chirac, père spirituel de Sarkozy : « Les Promesses n’engagent que ceux qui les écoutent ».

4- Les relations universités-entreprises seront améliorées grâce à plus forte autonomie

A cela l’UNI dit VRAI:

Le système français ne favorise pas le développement des liens entre universités et entreprises. Quelque soit le degré d’autonomie supplémentaire qu’offrira la loi, les partenariats avec les entreprises (programmes, financements, recherche...) n’en seront que plus facilités.

En fait on découvre le pot aux roses tout au long de l’article.

L’entreprise, si on traduit, aura un droit de regard sur les programmes, les financements et la recherche. Ainsi qui sera bénéficiaire des découvertes universitaires, en matière scientifique par exemple ? Ce n’est plus l’Etat mais l’investisseur donc l’entreprise privée. De plus on peut craindre l’affaiblissement de « la formation intellectuelle » en faveur d’un encouragement à une formation professionnelle ainsi que si c’est l’entreprise qui finance la recherche alors elle ne financera que ce qui l’intéresse, autrement dit certaines portes se refermerons parce que les découvertes qu’elles amènerons ne pourront pas faire l’objet d’une utilisation mercantile.



5- Les présidents d’université sont contre une autonomie accrue des universités

A cela l’UNI dit FAUX:

Depuis longtemps, les présidents d’université, réunis par la conférence des présidents d’universités (CPU) se prononcent pour une réforme permettant de donner plus d’autonomie aux universités. En 2001 déjà, ils avaient organisé un colloque dont les conclusions allaient dans le sens d’une réforme. Cela n’est que peu étonnant, vu qu’ils connaissent mieux que quiconque les blocages dus à notre système centralisé.

Certes oui... mais ce n’est pas de cette réforme qu’ils veulent, et pas de cette autonomie là. Ce qui est étonnant c’est qu’on parle de « blocage dus à notre système centralisé » donc la solution selon l’UNI serait une décentralisation donc un désinvestissement de l’Etat et donc une privatisation des universités. Ce qui serait par conséquent en contradiction avec ce qui a été dit jusqu’à présent.

6- La loi va accroître les inégalités entre les universités, et créer un système à deux vitesses, entre des grandes universités qui s’en sortiront d’une part, et les autres.

A cela l’UNI dit FAUX:

Le système à deux vitesses existe déjà, entre les Grandes Ecoles, qui bénéficient d’une grande autonomie, contractent de nombreux partenariats avec les entreprises, peuvent sélectionner leurs étudiants, fixer librement leurs droits d’inscription, élaborer leur programme librement..., et le universités, qui sont à la traîne. Le but de la loi est justement de donner les moyens aux universités de rattraper leur retard, grâce à un système de gestion rendu justement plus souple. Et une plus grande autonomie les incitera à mener une politique de l’excellence, afin d’attirer les meilleurs étudiants et les meilleurs chercheurs.

Saluons leur culot ! Si l’inégalité existe comme ils nous le disent c’est à cause de la privatisation, puisque les grandes écoles sont généralement privées et que les universités non, et ces sophistes veulent nous faire croire que la privatisation est le remède.

Si vous remarquez c’est dans ce paragraphe que nous avons tous les détails de la loi, ou du moins une grande partie. On parle de sélection des étudiants... je ne parlai pas d’anti égalitarisme ?... et pas n’importe quels étudiants : les meilleurs. En plus d’avoir une vision élitiste ils veulent contraindre les élèves moyens (qui pourraient plus tard être de grands scientifiques ou de grands juristes) à une orientation de formation professionnelle genre Bac Pro, CAP, BEP, alors qu’ils ont déjà une licence, la sélection ne se faisant qu’à l’entrée du master. En effet, la formation professionnelle commence au master, or ils veulent sélectionner les élèves qui rentreront ou non en master, leur refusant alors une formation professionnelle. De plus nous connaissons déjà les problèmes de discrimination à l’embauche qu’est-ce qui nous assurera alors que ces pratiques ignobles ne se feront pas lors de la sélection ?

De plus ces bons élèves généralement sont issus d’un milieu favorisé, ou de lycée ou collège privées, ils ont donc une formation plus poussée, grâce aux sous de leurs parents (cela ne concerne pourtant qu’une minorité des jeunes qui pour la plupart vont dans le public où les inégalités sont accrues à cause du manque de moyen, la droite considérant l’éducation nationale comme une peau de chagrin)

Ensuite fixer librement leurs droit d’inscription ça veut dire que ces Ecoles fixent elles-mêmes les tarifs d’inscriptions et les conditions (il faut des conditions, autre que celle d’avoir son bac). De plus les tarifs des écoles privées - bien que déjà très élevé - sont encore relativement abordables par une partie de la population, mais cela grâce au fait que les universités publiques qui proposent un enseignement de qualité tirent les tarifs d’inscriptions vers le bas.

Enfin élaborer leur programme librement, cela signifie que certaine filière pourront être supprimée et que l’enseignement ne sera plus le même de partout… ce qui revient à parler d’université à double vitesse.


7- Les CROUS ne sont pas concernés par la loi

A cela l’UNI dit VRAI:

La loi sur l’autonomie des universités ne concerne pas les aides sociales étudiantes, gérées par les CROUS (Conseils Régionaux des Œuvres Universitaires et Scolaires). Cependant, selon son contenu, elle pourrait inciter à diversifier le système d’aides sociales, en incitant les universités, collectivités locales, entreprises, fondations privées... à participer aux aides sociales (bourses, restauration, logement).

Et bien on ne peut pas reprocher à l’UNI d’être de droite et de ne pas avoir de la suite dans les idées… ça serait redondant. Il faut réfléchir aux conséquences. S’il y a sélection des élèves, les meilleurs pourront avoir une bourse, logement...etc. sauf s’ils ont des parents riche et donc qu’ils n’ont pas besoin de bourse. Or comme les frais d’inscriptions vont augmenter et que comme le budget d’aide va rester le même ils ne pourront donc plus aider autant d’élève qu’avant, donc augmentation des inégalités. Les aides d’ailleurs ne seront alors plus publiques mais privées... soit un pas de plus vers la privatisation des universités. Ce qui engage également que les critères d’obtention d’une bourse pourront ne plus être des critères sociaux.

8- La loi va être votée dans la précipitation

A cela l’UNI dit FAUX:

Il suffit de voir les réflexions qu’ont déjà mené de nombreux syndicats représentant les personnels enseignants et administratifs et les étudiants, ainsi que les nombreux rapports qui ont été rédigé depuis plusieurs années, pour voir que les esprits sont mûrs à une réforme. De plus, Nicolas Sarkozy avait élaboré de nombreuses réflexions sur l’autonomie des universités durant sa campagne qui alimentent le projet de réforme. Cela n’empêche pas une concertation de se faire actuellement avec les représentants des étudiants, des personnels et des présidents d’université. Le gouvernement a simplement l’intention d’aller vite. De plus, d’autres chantiers sur l’enseignement supérieur s’ouvriront rapidement, notamment sur les conditions de vie des étudiants.

Il suffit de voir comment la loi a été votée en moins de deux mois pour être sûr de l’appliquer dès la rentrée. De plus, dans la logique de la politique spectacle sarkoziste nous savons que les syndicats ont été invités pour faire croire qu’on allait les écouter. Aussi c’est une réflexion mener par la droite dans laquelle la gauche n’a aucunement pu donner son avis. Ainsi c’est d’une manière obtuse et arbitraire que ce projet de loi a été proposé.

Puis comme le dit l’UNI sans précipitation mais le gouvernement a simplement l’intention d’aller vite.

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