lundi 4 juin 2007

Travailler plus pour gagner plus

Rappel : Qu’en est-il des heures supplémentaires
Dans le code du travail, le recours aux heures supplémentaires à l'initiative de l'employeur et leur règlement sont strictement encadrés par les lois Aubry de 2000 et 2002 sur la réduction du temps de travail et complétés par toute une série d'accords de branche et d'entreprise. En 2003, le gouvernement Raffarin et son ministre de l'emploi, François Fillon, ont tenté de " détricoter " les 35 heures, en proposant de différer l'application de la RTT dans les petites entreprises et, ailleurs, de relever de 180 heures à 220 heures le nombre d'heures supplémentaires autorisées. A l'hôpital, un décret publié in extremis le 14 mai au Journal Officiel a plus récemment déplafonné le nombre d'heures accordées - de 15 à 18 heures par mois - et modifié leur rémunération pour certaines catégories de personnels infirmiers, sages-femmes ou manipulateurs de radiologie.

Au moment où de l’assemblée générale des actionnaires du constructeur automobile PSA vient de programmer la suppression de 4 800 postes (à ajouter aux 10 000 déjà annoncés l’année dernière), les salariés peuvent mesurer le cynisme de cette assemblée avec les décisions de verser 317 millions d’euros aux actionnaires : « À elle seule, la famille Peugeot touchera 95 millions» et de « distribuer aux dirigeants de l’entreprise jusqu’à 2,5 millions de stock-options. Que pensez de la proposition faite par la direction d’autoriser le rachat en Bourse d’actions PSA en vue de « réduire le capital de la société ». C’est une autorisation de puiser un milliard d’euros dans les caisses de l’entreprise, pour acheter des actions PSA et les détruire dans le seul but de faire monter le cours de la Bourse. Au cours de ces dernières années, ce sont plus de 2,7 milliards d’euros qui sont déjà partis en fumée. Autant de dépenses stériles.
Nous demandons que les richesses produites par les salariés servent au développement de l’entreprise, de l’emploi et des salaires.
Les actionnaires s’enrichissent au détriment des salariés. Le nombre de « travailleurs pauvres » ne cesse de croître et l’inégalité entre les hommes et les femmes est en augmentation. La revalorisation du pouvoir d’achat est une attente forte des Français. Selon Sarkozy, il suffirait de travailler au-delà des 35 H hebdomadaires pour voir son salaire augmenter. En défiscalisant et en exonérant de toutes cotisations sociales, dès juillet, les heures supplémentaires.

Une proposition cynique au possible.

Elle dédouane le patronat de toute augmentation salariale. les profits continueront à absorber l’essentiel des richesses produites Aujourd’hui, 41 % de la valeur ajoutée créée en France, c'est-à-dire de la richesse produite, est accaparée par la rémunération des capitaux, donc des actionnaires. C’est 12 points de plus qu’en 1981 et 6 de plus que la moyenne des pays de l’OCDE. Cela représente d’environ 165 milliards d’euros chaque année (10 % de la valeur ajoutée). Les dividendes ont augmenté de 193 % en dix ans, alors que le SMIG n’a progressé que de 20 %. Les profits du CAC40 explosent : AXA +20% BNP +23%, Danone +103% Schneider +46%, Total +13%.
La durée du temps de travail n’est pas fixée selon les souhaits du salarié. C’est le chef d’entreprise qui décide seul de recourir ou non aux heures supplémentaires.
§ Mesure contre la création d’emplois, "la détaxation des heures supplémentaires favorise les salariés en place au détriment de l'embauche". . La mesure pourrait aussi constituer un effet d'aubaine pour les entreprises qui privilégieraient le recours aux heures supplémentaires plutôt que la création d'emplois. Voir le rapport (1) au Conseil d'analyse économique. Si l'allégement des prélèvements obligatoires sur les heures supplémentaires accroît le pouvoir d'achat de ceux qui travaillent, "en contrepartie, le financement de cet allégement réduit le revenu des salariés qui ne font pas d'heures supplémentaires", soit, d'après des statistiques du ministère du travail, plus de 60 % d'entre eux
§ Mesure favorable à l'évasion fiscale. Les auteurs pointeraient, selon Les Echos, le risque d'une entente entre employeurs et salariés qui auraient intérêt à transformer les primes et une partie du salaire en fausses heures supplémentaires. " déclarer fictivement un grand nombre d'heures supplémentaires afin de bénéficier des avantages fiscaux".
La défiscalisation pourrait se heurter à un obstacle constitutionnel d'égalité face à l'impôt à l'égard des salariés à temps partiel.
Le gouvernement devrait s'en tenir à la proposition de défiscaliser les revenus supplémentaires correspondants aux heures supplémentaires. Cette exonération intéresse principalement les salariés à temps plein déjà assujettis. De facto, elle pourrait se heurter à un obstacle constitutionnel d'égalité face à l'impôt à l'égard des salariés à temps partiel. Selon la réglementation, en effet, ces derniers ne perçoivent aucune majoration sur les trois premières heures de travail " complémentaires " qui sont rémunérées à un taux normal en cas de dépassement du contrat de base. Or, le temps partiel concerne 41,5 % des salariés des entreprises de moins de dix salariés qui sont dans une plus grande proportion de surcroît en contrat à durée déterminée. Pour l'essentiel, ce sont des femmes, faiblement rémunérées, dans les secteurs de la distribution, de la santé, des entreprises de nettoyage ou du secteur associatif qui se trouveraient ainsi privées des bénéfices de la mesure gouvernementale. L'inégalité d'accès face à l'impôt pourrait aussi être invoquée si cette rémunération supplémentaire était exonérée de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) et de la CSG qui, en théorie, s'applique à l'ensemble des revenus.
L’exonération des charges sociales portera un coup aux régimes (2) des retraites, de l’assurance maladie, du chômage puisque ces heures supplémentaires travaillées ne produiront aucune entrée financière à ces régimes. Elle coûterait environ 5,6 milliards d'euros. Cette mesure va tout de suite frapper les Français au porte-monnaie. « Un risque de coût exorbitant pour les finances publiques » notent les experts. Conséquence : ces sommes seront prélevées sur les budgets publics et donc sur des dépenses utiles socialement.
Nous exigeons : Le SMIC à 1 500 € bruts par mois pour 35h00. Une augmentation générale des salaires et des retraites. Une revalorisation des traitements dans la fonction publique. La hausse des minima sociaux et des allocations. Une véritable allocation d’autonomie de la jeunesse


(1) Trois économistes, Patrick Artus, Pierre Cahuc et André Zylberberg, se montrent critiques sur la défiscalisation et l'exonération de charges sociales des heures supplémentaires, dans un rapport au Conseil d'analyse économique (CAE), mai 2007. "Une fiscalité spécifique sur les heures supplémentaires, présente un risque de coût exorbitant pour les finances publiques". Les rapporteurs jugent donc que "ce type de fiscalité ne constitue pas un moyen efficace de valoriser le travail."

(2) "Le bilan des cotisations sociales déjà exonérées en faveur du Patronat pour l'année 2006 est très préoccupant. En effet, ce qui est appelé « des aides pour l'emploi » en faveur des employeurs, atteint la somme de 23,9 milliards d'euros (156 milliards de F), soit près de 10% des cotisations perçues par les Urssaf. Mais en rapportant les exonérations aux seules cotisations patronales du secteur privé, leur part est alors de 19,5%. 21,6 milliards sont compensés par le budget de l'Etat, c'est-à-dire que les employeurs transfèrent leurs obligations sociales directement sur les contribuables.
Le manque à gagner pour les comptes de la Sécurité sociale est de 2,3 milliards d'euros, une somme considérable compte tenu de la conjoncture. On comprend mieux les projets actuels de fusion des lois de Finances de l'Etat et de financement de la Sécurité sociale à la lumière de ce constat. Les cartes seraient ainsi brouillées et les partenaires sociaux, comme les citoyens, n'auraient plus de visibilité sur les budgets propres de la Sécurité sociale.
Après une évolution de plus 4,7 % enregistrée en 2005, ces exonérations ont augmenté de 13,5 % en 2006 et c'est le dispositif « FILLON » qui explique quasi intégralement cette évolution conséquente des exonérations, selon les études de l'Acoss, la Caisse nationale des Urssaf. Le montant exonéré « FILLON » est maximal pour un Smic. Un tiers des exonérations sont relatives à un salaire inférieur à 1,1 Smic qui concerne 12 % des salariés. Quasiment la moitié du montant exonéré est générée par un salaire compris entre 1,1 et 1,3 Smic qui concerne 20 % des salariés. Au-delà de 1,6 Smic, soit 42 % des salariés et 58 %de la masse salariale, l'employeur ne bénéficie plus d'exonération.
L'Acoss constate également que plus l'établissement est petit, plus le taux d'exonération est élevé compte tenu de la faiblesse des salaires moyens versés par ces établissements. La construction, le commerce, l'agriculture et les services aux particuliers sont particulièrement concernés. Ainsi l'emploi à domicile concentre 1,6 milliard d'euros d'exonérations de cotisations auxquelles il faut ajouter des allègements fiscaux conséquents.
Cette situation est malsaine et préjudiciable pour les comptes sociaux, pour le budget de l'Etat, elle encourage l'emploi précaire et sous payé.

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